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L’adaptation des forêts aux changements climatiques est aujourd’hui un thème fortement étudié par la communauté scientifique. Cependant les résultats démontrés scientifiquement doivent également être testés à l’échelle locale. Pour cela, le projet FORECCAsT a accompagné la mise en place d’un réseau de 25 essais sylvicoles d'adaptation aux changements climatiques répartis sur le territoire du Parc naturel régional du Haut Languedoc.
Ces essais concernent à la fois des plantations et des peuplements forestiers déjà existants. Les protocoles détaillés de ces essais ainsi que les premiers résultats de leur suivi sont à retrouver page Téléchargement.
Au total, douze essais de plantations ont été installée sur le territoire du Parc, dont trois arboretums et neuf plantations mélangées.
Afin de mieux connaître les essences forestières qui pourraient être introduites sur le territoire, trois arboretums ont été plantés. L’objectif de ces essais est de tester des unités génétiques (provenance x essence) a priori adaptées aux changements climatiques, en particulier au déficit hydrique et à la sécheresse estivale.
Plantation de l'arboretum de Taussac-la-Billière (Juliane Casquet - Pnr HL)
La localisation de ces arboretums a été réfléchie selon un gradient climatique. En effet, les trois dispositifs seront implantés respectivement sur le plateau de Lacaune (Senaux, 81), dans le secteur de la Montagne noire (Mazamet, 81) et en zone méditerranéenne (Taussac-la-Billière, 34). Sur les trois dispositifs seront testées les mêmes unités génétiques (à quelques exceptions près) ce qui permettra d’estimer à l’échelle du territoire, les limites climatiques de chaque essence.
Des projets de recherche précédents ( NOMADES, REINFFORCE,…) ont aidé à choisir les essences testées. Elles ont été choisies pour leur potentiel d'adaptation aux conditions climatiques du territoire du Haut-Languedoc.
Les unités génétiques testées au sein des arboretums sont les suivantes :
Nom scientifique | Nom vernaculaire | Nom scientifique | Nom vernaculaire | |
Abies alba | Sapin pectiné | Pinus pinaster | Pin maritime | |
Abies bornmuelleriana | Sapin de Turquie | Pinus pinea | Pin pignon | |
Abies cephalonica | Sapin de Céphalonie | Pseudotsuga menziesii | Douglas origine Luzette | |
Abies nordmanniana | Sapin Nordmann | Pseudotsuga menziesii | Douglas origine Californie | |
Castanea sativa | Châtaignier | Quercus canariensis | Chêne africain | |
Cedrus atlantica | Cèdre de l'Atlas | Quercus cerris | Chêne chevelu | |
Cedrus libani | Cèdre du Liban | Quercus faginea | Chêne du Portugal | |
Celtis australis | Micocoulier de Provence | Quercus petraea | Chêne sessile | |
Fagus orientalis | Hêtre d'Orient | Quercus pubescens | Chêne pubescent | |
Fagus sylvatica | Hêtre commun | Quercus suber | Chêne liège | |
Pinus laricio corsicana | Pin Laricio de Corse | Robinia pseudoacacia | Robinier faux-acacia | |
Pinus nigra salzmanii | Pin de Salzmann | Sorbus domestica | Cormier |
Liste des unités génétiques testées dans les arboretums
Un suivi de la croissance et de la mortalité des plants sera réalisé par le CRPF Occitanie sur une période de 10 ans minimum. Il permettra d’étudier l’adaptabilité des différentes essences testées aux climats observés sur le territoire du Haut-Languedoc.
De nombreuses études scientifiques ont démontré que le mélange d’essence pouvait être favorable à plusieurs niveaux. Certains peuplements mélangés ont une consommation en eau différente en quantité ou en saisonnalité par rapport à des peuplements purs. La biodiversité augmente avec le nombre d’essences arborées dans un peuplement. Les peuplements mélangés peuvent également présenter une sensibilité moindre aux problèmes sanitaires comparés aux peuplements purs ; ceci est notamment dû au fait que les ravageurs repèrent moins facilement leurs arbres hôtes. Une augmentation de la productivité globale du peuplement a aussi été observée dans le cas de certains mélanges.
Cependant les interactions entre les espèces sont complexes et méritent d’être étudiées à l’échelle locale. Dans cette optique, neuf plantations mélangées ont été installés sur le territoire chez des propriétaires privés volontaires. Sur ces essais, des témoins de chaque essence ont été mis en place afin de comparer la croissance entre le peuplement mélangé et le témoin pur.
Tout comme les arboretums, les plantations mélangées seront suivies à long terme par le CRPF Occitanie afin d’étudier leur dynamique ainsi que les données de croissance du peuplement.
Installation d'une plantation mélangée à Cassagnoles (Constance Proutière - Pnr HL)
Le dernier volet de ces actions concerne les itinéraires sylvicoles. Différents itinéraires sylvicoles ont été mis en place sur treize sites où se trouvent des peuplements d'âge et d'essences variables.
Afin de limiter les besoins en eau des parcelles forestières et de réduire leur vulnérabilité face aux évènements climatiques extrêmes, nous avons testé l'effet d'un régime d'éclaircie plus fort (avec ou sans élagage) que celui réalisé habituellement sur le territoire. Cela a été testé sur des essences comme le douglas, le cèdre, le sapin de Nordmann et le mélèze. Diminuer la densité d'arbres à l'hectare permet aux forêts de consommer moins d'eau pour une surface équivalente. Certains de ces tests comparent aussi une éclaircie sélective "classique" et un détourage des arbres d'avenir.
Lorsque les peuplements sont plus âgés, il devient risqué de faire des éclaircies fortes qui peuvent nuire aux arbres en place. Dans ce cas de figure, nous avons testé des modalités d' irrégularisation, en favorisant la régénération naturelle par des trouées ou en y plantant des essences d'enrichissement. Sur des essences comme le douglas, le sapin pectiné ou le châtaigner, des éclaircies sur critères sanitaires ont visé à déclencher ou poursuivre la régénération naturelle à partir de semenciers sains ou résilients.
Peuplement mature d'épicéas et de sapins pectinés dans lequel plusieurs mesures d'adaptation ont été mises en place : trouées de régénération, enrichissement, amorce de l'irrégularisation (Juliane Casquet - Pnr HL)
Afin d'aider à la conservation et à la régénération de l'habitat d'intérêt communautaire "hêtraie atlantique acidiphile à houx" ( HIC 9120), trois sites ont été sélectionnés pour tester des interventions. Les éclaircies réalisées ont visé à pérenniser l’habitat (équilibre entre les différentes strates) en travaillant sur l’état sanitaire ou sur la régénération (trouées et / ou éclaircies, avec crochetage ponctuel du houx lorsqu'il constitutait un obstacle).
Site test de conservation de la hêtraie acidiphile atlantique à houx sur la commune de Cassagnoles (34) avant intervention. Les arbres à éclaircir pour favoriser la régénération naturelle de cette parcelle sont marqués d'un point rose
Étant donnée la vitesse de croissance des arbres, les résultats des tests d'itinéraires sylvicoles ne seront pas exploitables immédiatement. Il a donc fallu mettre en place un suivi des parcelles, afin de déterminer l'impact de nos expérimentations sur la vitalité du peuplement, le risque incendie, le stockage du carbone et la biodiversité.
Sur tous nos dispositifs, nous avons suivi la vitalité du peuplement, c'est-à-dire selon les cas :
Avec l'accord des propriétaires des sites concernés, ce suivi sera réalisé par le CRPF Occitanie, annuellement au début puis tous les cinq ans, même après la fin du projet FORECCAsT.
Certains itinéraires sylvicoles que nous testons visent à enclencher une irrégularisation au sein des peuplements, ce qui modifiera la stratification verticale et pourrait potentiellement augmenter le risque de propagation des incendies. A l'inverse, nous testerons aussi des plantations mélangeant des feuilles et des résineux, qui auront une inflammabilité plus faible que des peuplements de résineux purs. Afin de mesurer l'impact de nos pratiques sur le risque incendie, nous avons commencé un suivi spécifique du risque incendie qui sera répété au fil du temps.
Nous évaluerons aussi si les itinéraires sylvicoles testés modifient la quantité de carbone séquestré par les peuplements. Il est prévu d’utiliser notamment l' outil Climafor du CNPF, qui permettra d'estimer l'évolution du stock de carbone dans le temps à partir des données dendrométriques recueillies pour le suivi de la vitalité du peuplement.
Enfin, nous avons amorcé l'impact de nos interventions sur la biodiversité en suivant sur le long terme la présence, l'abondance et la diversité de plusieurs groupes d'organismes :
Inventaire des oiseaux d'une parcelle de hêtraie atlantique acidiphile à houx avec la LPO Hérault (Juliane Casquet - Pnr HL)
Ces sites expérimentaux ont aussi pour objectif de devenir des lieux de visites et de démonstration de pratiques d'adaptation de la sylviculture aux changements climatiques pour les professionnels du Pnr HL et d'ailleurs. Une dizaine de visites a eu lieu pendant le projet FORECCAsT et elles se poursuiront ensuite sur demande auprès du Pnr HL ou du CRPF Occitanie. Pour faciliter ces visites, tous les sites expérimentaux ont été équipés de panneaux résumant les objectifs de FORECCAsT et l'historique du site.
Après 45 mois de dur labeur, le projet FORECCAsT s'achève, mais cela ne signifie pas pour autant que nos actions ne vont pas se poursuivre !
La fin du projet étant imminente, c'est la valse des dernières fois !